lundi 4 mars 2019

La démocratisation des pulsions, clin d'œil à Laurent Obertone

Charles Danten
Voir aussi dans cet esprit, 
Les animaux sont l'ombre de la saga humaine
Après la Renaissance, au XVIsiècle, à l’aube de la révolution industrielle, une « mutation des sensibilités » s’amorce qui se traduira au XIXsiècle par un changement majeur de la condition animale (1). Jusqu’alors cantonnée aux classes aisées, la passion pour les animaux de compagnie se propage aux classes montantes de la bourgeoisie, jusqu’au peuple. Le chat un animal à fonction strictement utilitaire change de statut et devient un animal de compagnie dont la popularité ne cessera d’augmenter au détriment du chien et parallèlement à l’évolution des sociétés démocratiques (2). 

Un terrible fléau

Avant cette étape cruciale de l’évolution spirituelle et morale de la civilisation occidentale, les hommes vivaient comme les animaux, en diapason avec leur animalité, sans démarcation nette entre les uns et les autres ; les cochons, les vaches, les poules, les chiens et les chats, tout le monde ensemble dans la même maison, dans la même cour et dans la même rue. 
La violence manifeste, autant envers les humains qu’envers les animaux, était fort répandue, dans toutes les couches sociales. Les hommes portaient tous un couteau à la ceinture qu’ils n’hésitaient pas à dégainer au moindre prétexte. « La peur régnait partout. On se devait d’être constamment sur ses gardes », écrit le magistral historien sociologue, Norbert Ellias (3). L’abattage et le débitage des animaux de boucherie se faisaient en pleine rue dans des conditions abominables. « L’affrontement de chiens contre des taureaux ou des ours, souligne l’historienne, Kathleen Kate, est une distraction relativement banale (…)  on voit des femmes d’un certain rang, à l’exemple des dames romaines, prendre plaisir à voir couler le sang, à voir le taureau mis à mort par la fureur des chiens. (…) Dans les rues, il n’était pas rare de voir un cocher frustré battre à mort son cheval épuisé qui refusait d’avancer » (4).
Le baton à lui seul étant inefficace, voire contre-productif puisqu’il incite à la révolte, les autorités du moment ont choisi une manière plus douce pour gérer les pulsions et augmenter la cohésion sociale.

L’école obligatoire

Cette rénovation majeure dans la façon de dresser l’animal en soi, qui se dédouble à l’occasion en Satan, fut appliquée grâce à l’école obligatoire, une invention prussienne qui forçait tous les citoyens à se soumettre à un long processus de socialisation qui garantissait la bonne conduite tout en empêchant la dissension. Son institution fut pénible, car les parents de cette époque s’y opposaient fortement; les enfants étaient souvent conduits à l’école par les soldats, à la pointe du fusil (5). Aujourd’hui, ironie du sort, seul le fusil, et encore, pourrait empêcher les parents d’amener leurs enfants à l’école pour se faire endoctriner. 

L’instrumentalisation de l’écriture

Pour instiller la bonne conduite, tout le monde devait apprendre à lire et à écrire; la production de livres s’est donc soudainement intensifiée sur une échelle massive.
L’écriture paraît favoriser l’exploitation des hommes avant leur illumination. (…) La fonction primaire de la communication écrite est de faciliter l’asservissement. (…) L’action systémique des États européens en faveur de l’instruction obligatoire, qui se développe au cours du XIXesiècle, va de pair avec l’extension du service militaire et la prolétarisation. La lutte contre l’analphabétisme se confond ainsi avec le renforcement du contrôle des citoyens par le Pouvoir. Car il faut que tous sachent lire pour que ce dernier puisse dire : nul n’est censé ignorer la loi. (6) 

La civilisation des mœurs

« L’autorité de l’état et du maître doit être transféré de l’extérieur à l’intérieur du sujet, souligne le Prussien Hermann Francke (1663-1727), l’un des fondateurs du système pédagogique actuel, (…) c’est pourquoi il est important d’intégrer les règles du pouvoir à la personnalité de l’élève le plus tôt possible pour qu’il s’autodiscipline (7). » 
Ainsi, les principes de vertu et de bonne conduite doivent pénétrer au plus profond de la psychologie de l’élève, internalisés, somatisés au point de lui faire croire qu’il est libre de ses faits et gestes (8). 
Si la mauvaise conduite était encore punie par le baton (la peur) ou la punition positive, on pensait à cette époque, comme c'est toujours le cas, que la domination passive, par la carotte (le plaisir) était l’instrument de contrôle idéal. 
La sévérité excessive créant le ressentiment et la révolte, remplaçons-la, conseille Hermann Francke, par l’affection qui est un instrument de contrôle beaucoup plus efficace que la punition corporelle. (9) 
Au lieu de le forcer à coopérer par la discipline et la force brute, un sujet est amené à coopérer subtilement, gentiment, de son propre chef, grâce à diverses formes d’affection. 
Deux méthodes sont couramment utilisées pour le pacifier, le démocratiser, voire le dégriffer symboliquement :
1) Le conditionnement positif 
Un sujet est récompensé par un compliment, une bonne note, une prime, un jeu ou une friandise quelconque à chaque fois qu’il se comporte de la façon requise. 
2) Le conditionnement négatif
Un sujet est puni en le privant de récompense.
Cette méthode de dressage conduit rapidement à la dépendance affective et à la soumission aux règles établies. Substituer le plaisir à la peur confère au maître un pouvoir encore plus grand puisque le manque de récompense est plus redoutable que la punition positive ; la victime ressent un vide dont elle ignore la cause; elle ne peut par conséquent ni résister ni se défendre; tout ce qu’elle peut faire c’est obéir pour obtenir en échange les récompenses qui lui permettront de retrouver et de maintenir son équilibre psychique (10). 
Dans les démocraties où la méthode est bien huilée, personne n’a l’impression d’être mené par le bout du nez. La majorité des citoyens n’ont même plus besoin d’être incités à bien se tenir. Le maître inséré à l’intérieur domine les instincts selon les règles de l’art de la domination, subtilement, avec un minimum de force. Ce qui donne l’impression trompeuse que personne n’agit contre son gré, au point d’aimer ça et d’en redemander dans l’esprit de cette citation faussement attribuée à Aldous Huxley mais maintes fois reprise :
La dictature parfaite serait une dictature qui aurait les apparences de la démocratie, une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader. Un système d’esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l’amour de leur servitude…

Malaise dans la civilisation

C’était imprévisible à l’époque, avant le fait accompli, mais comme chez les autres animaux domestiques, notamment chez le chat, nous l’avons vu dans un article précédent, cette forme de dressage des instincts uniquement par la carotte infantilise la victime à un degré extrême, au point de dérégler son régulateur des émotions, « l’émotivostat », situé dans le lobe limbique du cortex cérébral ; ce qui a pour effet de baisser le seuil de tolérance au stress à un niveau dangereux pour la santé. Une anxiété chronique s’installe qui se traduit par une sensation de vide croissante et une chute de l’amour propre qu’un sujet essaiera de compenser en consommant… de plus en plus. 
Les uns canaliseront cette anxiété chronique dans divers faux-fuyants comme le militantisme, l'art, le collectionnisme, le tabagisme, la boulimie, l’achat compulsif (oniromancie), l’attirance obsessionnel envers tout ce qui est nouveau (néopathie), l’hypersexualité alors que les autres la somatiseront dans des maladies comme la cystite interstitielle, la colite, les troubles cardiaques et de peau, notamment l’automutilation (11).
L’ultralibéralisme, l’une des manifestations les plus connues de ce trouble du contrôle des impulsions (12) s’est traduit à une plus grande échelle par une dépression planétaire dont les symptômes principaux sont le chaos écologique, l’industrie de la guerre et un écart financier de plus en plus grand entre les riches et les pauvres. 

Le bestiaire, l’ombre et la lumière de la saga humaine

Naturellement, ce changement radical dans l’exercice du pouvoir et de la gestion des instincts se transpose sur le rapport aux animaux puisque le maître inséré dans la psychologie d’un sujet gère l’extérieur, et notamment les animaux en chair et en os, comme il gère l’intérieur. Ainsi, l’exaltation des vertus accompagnées d’une répression des défauts se concrétise par une affection pour les espèces, par leur symbolisme latent, qui flattent notre vanité et notre idéal humain et une brutalité envers celles qui les dévalorisent. Cela se traduit entre autres par une affection démesurée pour les animaux de compagnie (la lumière) et une prolifération massive des élevages industriels dans des conditions de cruauté tout à fait injustifiées d’un point de vue strictement productiviste (l’ombre). Pour le dire autrement, nos pulsions dérangeantes sont refoulées symboliquement dans les élevages et nos pulsions arrangeantes exaltées en surface dans les maisons.
La démarcation entre l’exaltation et le refoulement des pulsions est souvent floue, car les moyens de dressage varient à l’intérieur d’une dynamique commune qui oscille entre le plaisir et la peur. Ce qui rend le rapport aux animaux — et aux gens puisqu’ils sont aussi dressés de cette manière — parfois difficile à interpréter tellement les variantes sont nombreuses. 
Dans les grandes lignes, les animaux de compagnie se situent vers le pôle de la carotte et les animaux de rente à l’autre extrême, c’est-à-dire vers celui du baton. Mais, à l’intérieur de l’une ou l’autre de ces extrêmes, la dynamique peut varier considérablement. Le chien peut par exemple se retrouver à l’un ou à l’autre des deux pôles. Cependant, en général, ce dernier est entraîné avec un savant mélange de peur et de plaisir, alors que le chat, comme les citoyens d’une démocratie bien huilée, est dressé exclusivement à la carotte.
Ainsi, selon cette version des choses, par sa violence et sa cruauté manifestes, la condition des animaux de boucherie serait une dramatisation vivante d’un modèle de société ouvertement totalitaire et, par sa violence et sa cruauté latentes, la condition des animaux de compagnie serait une dramatisation vivante d’un modèle de société démocratique. Le fait que ces deux catégories d’animaux soient présentes dans une démocratie indique qu’à l’intérieur de cette structure politique, le totalitarisme est toujours bel et bien vivant, mais dans une forme « dégriffée » ou passive, invisible à l’œil, mais prête à bondir à la moindre occasion.
Dans cet esprit, la popularité grandissante des animaux de compagnie autant en Chine qu’en Iran serait le signe précurseur d’une violence en voie de prendre le maquis dans son opposé la non-violence, une stratégie déjà bien amorcée en Chine et à l’état embryonnaire en Iran où les classes sociales les plus aisées s’intéressent de plus en plus aux chiens de race pure, une passion totalement étrangère à la culture de ce pays (15).
L’animal domestique est donc un révélateur criant de vérité. Son absence ne veut rien dire, mais sa présence près de l’homme est symptomatique d’une pensée confuse qui s’efforce de gérer ses pulsions par différents moyens oscillant entre le plaisir et la peur. 
Dans cette optique, le rapport des humains aux animaux est un moyen de déceler, avec une précision chirurgicale, le Mal qui peut parfois se cacher dans son opposé le Bien. Ainsi, si vous voulez connaître la véritable nature d’une personne ou à plus grande échelle, une nation, qui vous regarde du haut de ses grandes qualités humaines, vous saurez à quoi vous en tenir. Si l’animal en question mange des croquettes industrielles, encore mieux, vous sentirez alors pour de bon l’odeur putride de soufre qui se dégage de ses entrailles… l’antre préféré du diable, par les temps qui courent… 

Références

1. K. Thomas (1983). Man and the Natural World: Changing Attitudes in England (1500-1800). London : Penguin.
2. Kathleen Kete (1994). The Beast in the Boudoir: Petkeeping in Nineteenth-Century France. University of California Press
3. Norbert Elias (1984). La civilisation des mœurs etLa dynamique de l’Occcident. Calmann-Levy.
4. Kathleen Kate. Ouvr. Cité.
5. John Taylor Gatto (2002).The Underground History of American Education; (1998). Dumbing us down; (2008). Weapons of Mass Instruction. New Society Publishers. [En ligne]. Adresse URL : www.johntaylorgatto.com/ (page consultée en mai 2011)
6. Claude Lévi-Strauss (1955). Tristes tropiques. Plon : 344.
7. Melton James (1988). Absolutism and the eighteenth-century origins of compulsory schooling in Prussia and Austria. Cambridge University Press: 40.
8. Une explication plus approfondie de la somatisation des comportements dépasse le cadre de ce livre. Pour ceux que la question intéresse voir : Antonio R. Damasio (1994). « L’hypothèse des marqueurs somatiques. » L’erreur de Descartes. Odile Jacob : 229. Le sociologue français Pierre Bourdieu s’est également penché sur cette question, voir : (1998). « L’incorporation de la domination. » La domination masculine. Éditions du Seuil : 
9. Le criminologue américain Lonnie Athens. [En ligne]. Adresse URL : http://en.wikipedia.org/wiki/Lonnie_Athens (page consultée en juin 2011. Lire le récit exceptionnel des découvertes de L. Athens par un journaliste d’investigation exceptionnel : Richard Rhodes (1999). Why they kill. The discoveries of a maverick criminal. Vintage books. Pour un résumé de ce livre : [En ligne]. Adresse URL : http://www.csudh.edu/dearhabermas/tchessay64.htm (page consultée en juin 2011).
10. Melton Jones. Ouvr. Cité : 42.
11. Ibid.
12. Néopathie : « La néopathie est un comportement obsessionnel consistant à être attiré de façon constante et répétitive par tout ce qui est nouveau. Dans ses aspects les plus extrêmes, elle relève de la psychopathologie et s'apparente par certains de ses aspects au collectionnisme de l'homme obsédé par l'idée de trouver à tout prix l'élément manquant à sa collection. Il faut avoir le dernier gadget, si possible "avant les autres". C'est pour ainsi dire la pratique d'une sorte de culte de la nouveauté pour la nouveauté, ne tenant absolument pas compte de son utilité ni de son prix. Le néopathe s'endette facilement pour satisfaire son besoin irrépressible d'objet nouveau. […] Le comportement néopathe est amplifié par la société de consommation qui entretient savamment l'attrait pour la nouveauté à travers la publicité. Une grande partie des objets produits par l'industrie se vendent grâce à une foule de consommateurs qui sont atteints de néopathie sans le savoir. Comportements collectifs que l'on mettra en relation avec l'acte d'achat compulsif induit par les messages séducteurs de la publicité. » [En ligne].Adresse URL: http://fr.wikipedia.org/wiki/Néopathieopathie (page consultée en juin 2011). 
13. « Troubles du contrôle des impulsions. » Catalogue et index des sites médicaux français. [En ligne]. Adresse eURL: http://www.chu-rouen.fr/ssf/psy/troublesducontroledesimpulsions.html (page consultée en juin 2011). 14. P. Pageat (1995). « Confort et bien-être des carnivores domestiques. » Point Vétérinaire ; 26 (165) ; A. C Gagnon (1997). « Les cystites félines d’origine émotionnelle. » Point vétérinaire ; 28 (181) : 1097-1101; C. Beata (1997). « Les maladies anxieuses chez les carnivores domestiques. » Point Vétérinaire ; 28 (180) : 67; V. Dramard et L. Hanier (1996). « La dépression réactionnelle chez le chat. » Point Vétérinaire ; 27 (173) ; K.L. Overall (1996).  « Separation anxiety and anxiety related Disorders. » American Animal Hospital Association Proceedings (AAHA); (1997). Clinical behavioral medicine for small animals. Mosby.
14. Yi-Fu Tuan (1984). Dominance and affection. The Making of pets. Yale University Press : 4.
15. Stuart Spencer (2006). « History and Ethics of Keeping Pets: comparison with farm animals. » Journal of Agriculture and Environmental Ethics; 19 : 17-25; Jean Pierre Digard (2003). « Les animaux révélateurs de tensions civiques en république islamiste d’Iran. » Études Rurales; 123 et 132: 165-166. 

mardi 26 février 2019

Animals are the shadow of the human saga

Charles Danten

The morphological and psychological changes that domesticated animals have undergone in a relatively short time period to become what they are today are not without strange resemblance to those we have undergone across our own recent evolution. The techniques of domestication – confinement, food deprivation, physical and mental castration, selection for docility, incest, and coercion – were also used to domesticate humans. It could be said that the animal condition is actually an unconscious transposition of the human condition; accordingly, my book, Slaves of Our Affection. The Myth of the Happy Pet, can be considered an allegory, or a metaphor, of the human condition. Animals are indeed the shadow of the human saga. Following are several examples along these lines.


Confinement and food deprivation

To domesticate some of the bigger or more dangerous species like wolves, the size and character of the individuals had to be acted upon. One of the techniques used was food deprivation and confinement. Recent studies have shown that food quality and conditions of captivity have an impact on the weight of offspring at birth, on their vitality, and on longevity. According to specialists, these remarkable physiological changes are attributable to the stress linked to captivity and to hormonal disturbances associated with a physically and psychologically abnormal state of dependence. The increased frequency of disease and the decrease of mobility and general activity also have a strong impact on the size and vigor of the newborn. 

Modern-day breeders of Pot-bellied Vietnamese pigs, for example, are quite familiar with the effects of a lack of exercise and nutritional deprivation on animals. Some do not hesitate to keep theirs hungry and in miniscule cages to hinder growth. (17) These methods have actually been known for a very long time and have even been applied to humans. As such, two thousand years ago, the Greeks closed up their children in chests, called gloottokoma, made for this purpose. The Romans underfed their children with the same goal in mind. (18) 

After a few generations of this treatment, the facial bones are flattened and saggy, the jaw is shorter, and the teeth, smaller. Chewing is done less efficiently. Limbs are also shorter, and the biomechanics of the body are transformed. Fatty tissues are more abundant and musculature is less developed. At archaeological sites, size is one of the criteria used by anthropologists to identify animals as either domesticated or at least as no longer having lived in their natural habitat. (19)(20)(21)

Food deprivation or an inadequate diet also has a marked effect on sexuality. In nature, the oestrogen cycle depends on food availability. In order to adapt to a chronic lack of nourishment and a short life expectancy, a captive animal reproduces more quickly. It goes from having one heat cycle per year, like wolves, to having two or three depending on the pressure of selection being exerted. (22) It is also sexually precocious. A female dog can come into heat at five or six months of age, while a wolf is only mature at two years. Promiscuity and devious sexual behaviour is the norm in captivity, whereas it is nearly absent in most species living in their ecosystem. (23)(24)(25)

As noted by Konrad Lorenz, like other domesticated animals, humans no longer subjected to natural selection also accumulate irregularities and malformations, which would otherwise be quickly eliminated. (26) In Greece and Turkey for instance, paleopathologists have uncovered thousands of deformed human skeletons dating back to the beginning of sedentary life and agriculture, which show the unmistakable signs of nutritional disease and stunted growth. The hallmark of domestication is a genetic drift that cumulates into marked decadence. (27)


Castration

In addition to acting on the size of animals by food deprivation and confinement, we have sought to calm the natural ardours of more aggressive species and to inhibit unbridled sexual instincts. Castration has been the favoured method of doing so since the beginning of domestication. In the New World, only a few centuries ago, castration was also used to calm those black slaves who tended to revolt or escape a little too often. Theirs is a lesser-known story than that of the eunuchs, or castrated men, in China, Greece, Persia, and ancient Rome. Eunuchs were charged with protecting the harem and some became the irreplaceable confidants of the lords. In the 16th century Chinese imperial court, more than 20,000 eunuchs served as functionaries, guards, messengers, and servants. Finally, there was a time of partiality to castrated choral singers. Farinelli (1705-1782) was among these; he had a brilliant singing career that put him at the personal service of Spain’s Philippe V. The king, who was afflicted with chronic melancholy, found relief only in listening to the miraculous voice of Farinelli, one of the world’s best-known human songbirds. (28)


Selection for docility

While neutering has always been the favoured method of making animals tamer and more docile, it has its limitations: for obvious reasons, you cannot sterilize animals you intend to breed. So, creating animals that were more subdued and manageable also required selecting for docility. As I mentioned earlier, animals with the most pronounced juvenile characteristics were also the most attaching and the most moving; they were the ones that received the most mercy. In other words, the most docile and submissive animals, those that obeyed the most, that let themselves be picked up or taken along, were those which had the best chance of being kept and bred. A recent study has shown that wild foxes raised for fur and selected for their docility towards man will behave like dogs within only twenty generations or so. They seek out human company more and more, and wag their tails. Physically, they shed for longer periods, their ears become floppy, their tails straighten, and their coats change color. The persistence into adulthood of juvenile physical traits and infantile behavior constitutes one of the most striking features of the domestic animal. An adult dog demonstrates behaviors typical of a wolf cub: he seeks frequent attention, he likes to play, he barks, he wiggles, and he crawls submissively. Like a child, he is extremely dependent and, consequently, easily bored. The dog is an eternal adolescent, impetuous and extravagant, and this is probably what makes him so endearing. We would feel very differently about dogs if they outgrew these qualities and acquired social maturity. (29)

It is worth noting that totally dependent animals, whose owners make them lead an almost vegetative existence with limited or no contact with other members of their species, often do not show any sexual impulses; when they do, the impulses are not pronounced or are abnormal and directed towards their adopted master. Some hyper-domesticated males do not raise their leg to urinate and some females do not go into heat, if they do at all, before two or three years of age. 

The brain of a captive animal is smaller than that of his wild counterpart and his senses are much less sharp. Dependence is associated with a degeneration of sensorial faculties. Because domestic animals live less intense lives than wild animals, their senses of smell, sight, hearing, taste, and touch are less solicited; as a result, they become dulled. (30)

In human beings, the shift from nature to culture has favored a form of evolution, which caused some profound changes in our morphology and in our psychology. Man’s flat face, high domed skull and large brain, reduced pelt, large eyes, and small teeth are all infant features that we retain into adulthood. (31) Additionally, the civilization process has resulted in a tightly woven network of social interdependency that is directly related to an increase in docility and submissive behavior. (32) In our present consumer world, adults, like children, are extremely sensitive to a lack of attention. Unless they are constantly entertained and encouraged, they are prone to anxiety, boredom, and depression. 


Inbreeding

Once an animal is smaller, docile and under control, it can be transformed, molded, and sculpted like a garden plant, according to the needs and desires of its creator. The preferred way to do so is by inbreeding.

By mating brothers and sisters, fathers and daughters, mothers and sons, the desired traits are more quickly manifested – after only a few generations – in higher and higher numbers of the offspring. These traits eventually become fixed in the genes and reproduce themselves with a predictable regularity. Such inbreeding is the cornerstone of domestication. The transformation of a species is possible thanks only to animal incest. (33)

Even in humankind, incest has been used across history to maintain “purity.” Kings, for example, had sex freely with their children. Nobles married kin. In Jewish and Arab communities that practice endogamy, the gene pool becomes so limited that health problems begin to occur more frequently, forcing its members to actively seek new genes outside the community. Today, with few exceptions, we no longer marry next of kin - too dangerous - but we do tend to assemble and marry with likeminded people, a kind of positive “incest,” which leads to cultural, racial, and ethnic preservation.


Coercion

The last stage of the domestication process is training. A domesticated animal must learn at least to behave in a controlled manner, and often to obey commands as well. This is achieved through use of positive and/or negative conditioning: 
– Positive conditioning, aka the carrot: a subject is rewarded with some form of reward, such as praise, petting, games, or food, when it performs a desired behavior. 
– Negative conditioning: a subject is punished through the removal of a reward. 
– Positive punishment, aka the whip: a subject may be beaten with a leash, momentarily choked with a collar, slapped on the head, etc.
In general, farm animals are trained using the third method exclusively. In dogs, methods two and three are often used alternatingly. For those who are quite adept at the art of domination, methods one and two are preferred, for reasons of image, as in the case of animal lovers.
The carrotis also popular for controlling people, especially in older democracies where the whipis used most often on those who do not respond to the softer means of coercion.